Une centaine de personnes assistaient, mardi 25 septembre dans la soirée, à une réunion d’information plutôt animée à la mairie du 18e. Le patron d’Orange à Paris, Jean-Pierre Dicostanzo, et trois responsables techniques de l’opérateur faisaient face au public. A leurs côtés, Pascal Julien, adjoint au maire du 18e chargé de l’environnement, animait les échanges (et tempérait les ardeurs), tandis qu’Etienne Cendrier, porte-parole de Robin des toits, faisait entendre la colère des riverains de la rue Marcadet, qui l’avaient mandaté pour les représenter.
Pendant l’été, Orange a en effet largement entamé l’installation d’antennes de téléphonie mobile sur le toit du 173, rue Marcadet, avant de stopper les travaux, sous la pression des habitants. Le contexte est particulier : ce quartier s’est mobilisé dès 2003 pour s’opposer au déploiement de toute nouvelle antenne relais, avec l’appui de la mairie d’arrondissement.
Orange est toutefois dans son droit : la demande a été déposée dans les règles, l’opérateur a trouvé un accord avec le bailleur pour louer le toit et l’installation s’est déroulée alors qu’aucune charte ne s’appliquait, puisque la situation était bloquée entre la ville de Paris et les opérateurs. Mardi soir, Orange a plaidé la nécessité de développer la couverture à Paris, en particulier dans cette zone, alors que le trafic de données sur mobiles augmenterait de 5% par semaine dans la capitale.
A cran, les riverains, qui ont organisé récemment un "démontage" symbolique d’une antenne, ont rappelé que l’installation s’est déroulée de manière pour le moins cavalière.
Pour le moment, Orange a accepté de suspendre les travaux en attendant la réalisation de mesures des champs magnétiques par l’Agence d’écologie urbaine de la Ville de Paris. La situation semble toute fois bloquée : après ces mesures, Orange aura le droit de mettre ses antennes en service, malgré la grogne des riverains et la proximité d’une crèche et d’une école.
La nouvelle charte sur la téléphonie mobile au centre des débats
Leur représentant, Etienne Cendrier, a donc préconisé d’empêcher ces mesures afin de bloquer l’opérateur. Et il demande que la signature de la nouvelle charte de téléphonie mobile, qui doit être votée au Conseil de Paris les 15 et 16 octobre, soit conditionnée par le retrait de ces antennes de la rue Marcadet. « C’est une position pragmatique, nous explique-t-il, car nous savons que cette charte, que nous contestons, sera votée. » Selon lui, la mise en service serait un camouflet pour Daniel Vaillant, maire du 18e, qui s’est engagé auprès des habitants...
Il souhaite aussi que cette nouvelle charte impose une étude d’impact sanitaire de la 4G, avant le déploiement de cette nouvelle génération. « Cela n’a jamais dans le domaine de la téléphonie, mais c’est pourtant indispensable, comme pour les médicaments. N’oubliez pas que tous les portables 4G serviront d’antennes pour le réseau, ce qui n’est pas rassurant. »
La nouvelle charte prévoit des seuils maximaux de 5 V/m (volts par mètre) pour le GSM et la 3G (Internet mobile) et 7 V/m pour la 4G dans les lieux de vie fermés (appartements, bureaux...). Dans la précédente charte, le seuil était de 2 V/m mais il s’agissait d’une d’un niveau d’exposition moyenné sur 3 points et sur 24 heures. Dans son communiqué, la Ville de Paris assure donc que la nouvelle charte va faire baisser les niveaux d’exposition aux champs électromagnétiques « d’environ 20 %». Ce dont doute Etienne Cendrier : « 2 V/m en moyenne, ça correspond à des pics proches de 5V / m, c’est donc le statu quo. C’est même pire parce que, avec cette charte, la Ville s’engage à accompagner les opérateurs pour trouver de nouveaux toits ».
« Comment sortir de cet emballement technologique ? »
Pour lui, comme pour certains élus tels Pascal Julien de la mairie du 18e ou Sylvain Garrel, président du groupe EELV au conseil de Paris, également présent mardi, le seuil acceptable est à 0,6 V/m : c’est la limite sous laquelle les études scientifiques indépendantes n’auraient pas relevé d’effets nocifs. « Mais les opérateurs n’en veulent pas car cela les obligerait à installer des antennes moins puissantes en plus grand nombre et ce serait moins rentable », assure Etienne Cendrier.
Les pistes fusent en fin de séance. Sylvain Garrel évoque la possibilité de municipaliser les antennes pour contenir leur multiplication. Des personnes se demandent « comment sortir de cet emballement technologique » qui nous amène à baigner dans toujours plus d’ondes. Et des Parisiens d’autres quartiers prennent la parole pour évoquer leurs craintes, à propos, par exemple, de l’implantation d’antennes de Free sur une place de Clichy déjà bien arrosée par les autres opérateurs. « Le collectif 173 n’est pas tout seul », clame quelqu’un dans la salle. Le début d’un grand mouvement anti-ondes à Paris ?
Rue Marcadet, en tout cas, la mobilisation ne devrait pas retomber, si l’on en croit les dernières nouvelles relatées ce mercredi par Robin des toits dans un communiqué : « Hier soir, (...) Monsieur Jean-Pierre Dicostanzo, directeur régional Paris, s’est engagé à ne pas poursuivre les travaux au 173, rue Marcadet et à ne pas mettre en service les antennes avant que des mesures de champs électromagnétiques soient réalisées. Ce matin, dès 6h, Orange France reprenait les travaux. Que valent les promesses d’Orange ? »
Voir les implantations des antennes à Paris sur le site de l’agence nationale des radiofréquences :
www.cartoradio.fr