(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Jean-David CIOT,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En matière de télécommunication, la dernière décennie a vu, dans les pays développés, se généraliser l’usage de la téléphonie mobile. La France compte ainsi 69,5 millions de cartes SIM mises en services au premier trimestre 2012, contre seulement 5,7 millions de clients mobiles en 1997. Cette évolution technologique a profondément modifié le quotidien des Français, à tel point que le portable exerce un rôle indispensable tant pour le confort domestique, que pour les relations professionnelles.
Néanmoins, ce processus très rapide s’est largement affranchi des contraintes juridiques, bénéficiant d’une réglementation peu précise et contraignante. De ce fait, l’installation, sur le territoire national, des 157 000 antennes-relais GSM ou UMTS actuellement recensées, s’est effectuée en dehors de toute politique de régulation orientée par l’État. Ce dernier a, en effet, jugé préférable de laisser les opérateurs négocier au cas par cas avec les propriétaires immobiliers.
Or ce flou normatif peut se révéler préjudiciable pour la santé des populations. En effet, l’impact des ondes électromagnétiques sur les organismes vivants est encore largement méconnu, de telle sorte qu’aucune conclusion scientifique définitive ne peut aujourd’hui être établie. Certaines recherches permettent néanmoins d’alerter l’opinion sur le fait que les individus résidant à proximité d’antennes-relais peuvent davantage souffrir de pathologies diverses, notamment cancéreuses. L’Organisation Mondiale de la Santé (O.M.S.) a ainsi été amenée à conclure, en 2011, que les téléphones portables sont « peut-être cancérigènes pour l’homme », au même titre que la laine de verre ou les vapeurs d’essence.
Par conséquent, l’existence d’expertises contradictoires autour d’un risque potentiel doit inciter à la prudence. Si la loi n’a pas vocation à trancher les controverses scientifiques, elle se doit de mettre en œuvre les moyens nécessaires à la protection sanitaire immédiate de nos concitoyens. Il apparaît donc nécessaire de mieux encadrer les procédures d’information, d’autorisation, et de contrôle autour de l’implantation des antennes-relais.
Il semble également indispensable d’assurer l’égalité de tous devant les risques technologiques, les pratiques en usage privilégiant la concentration d’antennes sur les toits des Habitations à Loyer Modéré. Pour implanter une antenne, les opérateurs doivent engager une négociation bilatérale avec les propriétaires de locaux ou de terrains, auxquels ils proposent un loyer pour obtenir une autorisation sur ledit espace. Ils privilégient donc logiquement la discussion avec les bailleurs sociaux, qui représentent un interlocuteur unique doté d’une grande surface immobilière. Cependant, il en résulte le fait que ce sont les populations à faible revenus qui sont prioritairement exposées aux émissions électromagnétiques.
Cette proposition de loi se propose donc de renforcer le cadre juridique régissant l’installation des antennes-relais, sans pour autant affaiblir la dynamique de développement de la téléphonie mobile. Quatre points sont ainsi visés par ce texte.
1) Réduire l’exposition des populations par la mise en place d’un principe de sobriété d’émission
Il s’agit en premier lieu de revoir à la baisse les seuils maximum autorisés d’émissions électromagnétiques, à l’aune des pratiques en vigueur dans les autres pays européens. La France autorise actuellement des valeurs d’exposition du public oscillant entre 41 et 61 volts/mètre selon la fréquence utilisée, alors que nombre de nos voisins ont adopté des normes comprises entre 3 et 6 volts/mètre, sans que cela ne nuise pour autant aux capacités de couverture des différents opérateurs. Par mesure de prévention, il serait donc nécessaire d’introduire le principe de sobriété d’émission, dit principe « ALARA » (As low as reasonnably achievable), dans la loi, afin de tendre vers les plus faibles volumes d’émission possibles, sans que cela n’altère la qualité de la couverture. Il s’agit notamment de faciliter l’intervention publique sur les territoires où l’on enregistre des « points chauds », c’est-à-dire des dépassements atypiques des valeurs moyennes.
En complément de cette intention générale, des mesures spécifiques de protection seront prises en faveur des enfants de moins de 6 ans, plus vulnérables que le reste de la population, et pour lesquels aucune étude ne peut documenter l’absence vérifiée d’impact sanitaire suite à une exposition prolongée aux rayonnements électromagnétiques.
2) Renforcer l’information des populations
La question de l’information de la population sur les localisations d’implantations d’infrastructures, ainsi que les volumes d’émissions auxquels elle est exposée selon les lieux d’habitation, nécessite également de meilleurs développements. Jusqu’à présent, aucune publicité n’est donnée aux choix d’installation des antennes-relais, et de nombreux citoyens ignorent vivre à proximité de l’une d’entre elles. La réalisation de mesures à l’extérieur et à l’intérieur des habitations dans les zones exposées n’est également pas prévue dans les textes en vigueur, ce qu’il convient de corriger.
Ce texte estime également que le débat sur le développement des antennes-relais et le développement des nouvelles technologies des télécommunications électroniques mérite d’être porté non seulement par les décideurs et les opérateurs, mais également par tous les citoyens. Il s’agit de promouvoir une forme de gouvernance participative, par la création de commissions d’information et de suivi ouvertes aux associations.
3) Associer les pouvoirs locaux à la régulation
En outre, cette proposition de loi s’attache à inscrire la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale, détenteurs de la compétence en termes d’établissement et d’exploitation des infrastructures et réseaux de communication électronique, dans le processus de décision. En effet, le rôle des pouvoirs publics locaux est actuellement minoré. Le Conseil d’État a en effet jugé, en octobre 2011, que seules les autorités de l’État sont compétentes pour réglementer l’implantation des antennes-relais de téléphonie mobile. Il s’agit par conséquent de donner aux maires ou aux présidents d’intercommunalité la possibilité de surseoir à l’implantation d’un équipement, en motivant leur position de manière suffisamment étayée.
4) Mutualiser les équipements pour protéger les populations des habitats collectifs
L’implantation des équipements électromagnétiques fait apparaître fortes différences sociales et territoriales, selon le type d’habitat. Il est en effet possible de constater une forte concentration de pylônes sur les toits des locaux d’habitation collective, et notamment sur ceux des Habitations à Loyer Modéré, pour les raisons mentionnées précédemment. De ce fait, les populations les plus démunies sont les plus exposées aux rayonnements électromagnétiques. Il est par conséquent nécessaire d’avancer dans deux directions. D’une part, par souci d’équité, le loyer perçu par le bailleur pourrait être partiellement redistribué aux locataires du local concerné via des exonérations sur les charges locatives. D’autre part, il est nécessaire d’encourager la mutualisation des infrastructures entre les opérateurs de téléphonie mobile.
Il devient désormais indispensable, pour le législateur, de pallier les carences du droit relatives à l’encadrement de l’implantation des antennes-relais. Les collectifs citoyens qui se sont multipliés ces dernières années témoignent de l’inquiétude des populations quant aux conséquences des pollutions électromagnétiques sur leur bien-être. Cet enjeu de santé publique doit recevoir une réponse rapide de la part des institutions de la République.
Tel est l’objet de la proposition de loi que nous vous proposons d’adopter.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Au début de l’article L. 34-9 du code des postes et des communications électroniques est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Les installations de l’État établies pour les besoins de la défense nationale ou de la sécurité publique ou utilisant des bandes de fréquences ou des fréquences attribuées par le Premier ministre à une administration pour les besoins propres de celle-ci, en application de l’article L. 41, ne sont pas concernées par la présente section. »
Article 2
Les trois derniers alinéas de l’article L. 34-9-1 du même code sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Dans la limite du plafond ainsi établi, les opérateurs s’emploient à ce que ces valeurs tendent vers les plus faibles niveaux possibles, sous réserve d’assurer la continuité du service rendu et le maintien de la couverture réseau.
« La municipalité ou l’établissement public intercommunal compétent en matière d’exploitation des infrastructures de télécommunications peut lancer, sur son territoire, des campagnes annuelles de mesures, par des organismes répondant à des exigences de qualité fixées par décret.
« Le résultat de ces mesures est transmis, par les organismes mentionnés au deuxième alinéa, à la collectivité ou à l’établissement public responsable, à l’Agence nationale des fréquences qui en assure la mise à disposition du public en complétant ses données cartographiques, ainsi qu’à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
« Lorsque la mesure est réalisée dans les locaux d’habitation, les résultats sont transmis à leurs propriétaires et à leurs occupants. Ces résultats doivent mentionner le nom du bureau de contrôle. Tout occupant d’un logement peut avoir accès, auprès de l’Agence nationale des fréquences, à l’ensemble des mesures réalisées dans le logement.
« Lorsque la mesure fait apparaître un dépassement significatif de la moyenne observée au niveau national, l’Agence nationale des fréquences enjoint au(x) propriétaire(s) du ou des équipements mis en cause de procéder, à leurs frais, à la réduction du volume d’émission. De nouvelles mesures sont effectuées à l’issue de l’opération. En cas de persistance d’un niveau anormalement élevé, le maire ou le président de l’établissement public intercommunal compétent peuvent faire procéder à la désactivation de l’équipement, aux frais de son propriétaire. »
Article 3
Après l’article L. 34-9-2 du même code sont insérés des articles L. 34-9-3 à L. 34-9-7 ainsi rédigés :
« Art. L. 34-9-3. – Lorsqu’il est constaté, dans le périmètre d’un même local d’habitation, la présence de plusieurs équipements radioélectriques, l’Agence nationale des fréquences adresse aux opérateurs gestionnaires desdits équipements une demande de mise en place d’un plan de mutualisation des infrastructures existantes. Elle en surveille, en lien avec le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale, la bonne exécution. Si elle constate, dans un délai estimé raisonnable, la non-effectivité de cette opération, elle fait procéder à la désactivation d’un ou plusieurs des équipements présents dans le périmètre concerné, aux frais de leurs propriétaires.
« Art. L. 34-9-4. – Tout projet d’implantation d’une antenne-relais de téléphonie mobile doit faire l’objet d’un affichage clair et visible en mairie, ainsi que dans le périmètre du local d’habitation concerné.
« Art. L. 34-9-5. – Aucune antenne-relais de téléphonie mobile n’est installée au sein du périmètre d’un établissement scolaire ou d’un établissement d’accueil d’enfants de moins de six ans. La délimitation précise du périmètre au sein duquel s’exerce cette interdiction est définie par décret.
« Dans ces établissements, l’accès sans fil à internet est désactivé au profit des connexions filaires.
« Art. L. 34-9-6. – Lorsque l’installation d’une antenne-relais de téléphonie mobile dans le périmètre d’un immeuble d’habitation fait l’objet de l’acquittement d’un loyer, celui-ci est réparti à parts égales entre propriétaires et occupants dudit immeuble.
« Art. L. 34-9-7. – Sur le territoire de la commune ou de l’établissement public intercommunal compétent, une commission d’information et de suivi sur les antennes-relais examine annuellement les résultats des mesures réalisées en application de l’article L. 34-9-1. Ses séances sont publiques. Cette commission doit être consultée sur les projets de déploiement présentés par les opérateurs.
« La commission d’information et de suivi sur les antennes-relais se compose d’élus, de représentants des exploitants des réseaux, de membres des services de l’État concernés et de représentants d’associations agréées œuvrant dans le champ de la protection de l’environnement et de la santé. Ses membres exercent leurs fonctions à titre gratuit. »
Article 4
Le premier alinéa de l’article L. 33-3 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve de leur conformité aux dispositions du présent code, les installations radioélectriques n’utilisant pas des fréquences spécifiquement assignées à leur utilisateur sont établie après consultation de la commission d’information et de suivi sur les antennes-relais mentionnée à l’article L. 34-9-4 du présent code, sur présentation de la décision d’accord de l’Agence nationale des fréquences mentionnée au quatrième alinéa de l’article L. 43.
« La commission transmet un avis au maire ou au président de l’établissement public de coopération intercommunale, qui peut décider de sursoir au projet d’installation. Cette décision est motivée par le degré de concentration d’installations existantes dans le périmètre concerné, l’impact de l’équipement sur l’environnement naturel, et toute information susceptible d’étayer significativement la possibilité d’un risque sanitaire sur les populations environnantes. »
Article 5
Le cinquième alinéa du I de l’article L. 43 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque l’Agence nationale des fréquences estime que, dans le périmètre d’un local d’habitation, un projet d’implantation d’une antenne-relais pourrait être évité par une meilleure mutualisation des équipements entre plusieurs opérateurs, elle ne peut donner d’accord. »
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Source : http://www.assemblee-nationale.fr/14/propositions/pion1002.asp
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Voir également :
- "Proposition de loi relative à la régulation de l’installation des antennes relais de téléphonie mobile" - Jean-David Ciot (PS) - Oct 2012
présentée par
M. Jean-David CIOT,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En matière de télécommunication, la dernière décennie a vu, dans les pays développés, se généraliser l’usage de la téléphonie mobile. La France compte ainsi 69,5 millions de cartes SIM mises en services au premier trimestre 2012, contre seulement 5,7 millions de clients mobiles en 1997. Cette évolution technologique a profondément modifié le quotidien des Français, à tel point que le portable exerce un rôle indispensable tant pour le confort domestique, que pour les relations professionnelles.
Néanmoins, ce processus très rapide s’est largement affranchi des contraintes juridiques, bénéficiant d’une réglementation peu précise et contraignante. De ce fait, l’installation, sur le territoire national, des 157 000 antennes-relais GSM ou UMTS actuellement recensées, s’est effectuée en dehors de toute politique de régulation orientée par l’État. Ce dernier a, en effet, jugé préférable de laisser les opérateurs négocier au cas par cas avec les propriétaires immobiliers.
Or ce flou normatif peut se révéler préjudiciable pour la santé des populations. En effet, l’impact des ondes électromagnétiques sur les organismes vivants est encore largement méconnu, de telle sorte qu’aucune conclusion scientifique définitive ne peut aujourd’hui être établie. Certaines recherches permettent néanmoins d’alerter l’opinion sur le fait que les individus résidant à proximité d’antennes-relais peuvent davantage souffrir de pathologies diverses, notamment cancéreuses. L’Organisation Mondiale de la Santé (O.M.S.) a ainsi été amenée à conclure, en 2011, que les téléphones portables sont « peut-être cancérigènes pour l’homme », au même titre que la laine de verre ou les vapeurs d’essence.
Par conséquent, l’existence d’expertises contradictoires autour d’un risque potentiel doit inciter à la prudence. Si la loi n’a pas vocation à trancher les controverses scientifiques, elle se doit de mettre en œuvre les moyens nécessaires à la protection sanitaire immédiate de nos concitoyens. Il apparaît donc nécessaire de mieux encadrer les procédures d’information, d’autorisation, et de contrôle autour de l’implantation des antennes-relais.
Il semble également indispensable d’assurer l’égalité de tous devant les risques technologiques, les pratiques en usage privilégiant la concentration d’antennes sur les toits des Habitations à Loyer Modéré. Pour implanter une antenne, les opérateurs doivent engager une négociation bilatérale avec les propriétaires de locaux ou de terrains, auxquels ils proposent un loyer pour obtenir une autorisation sur ledit espace. Ils privilégient donc logiquement la discussion avec les bailleurs sociaux, qui représentent un interlocuteur unique doté d’une grande surface immobilière. Cependant, il en résulte le fait que ce sont les populations à faible revenus qui sont prioritairement exposées aux émissions électromagnétiques.
Cette proposition de loi se propose donc de renforcer le cadre juridique régissant l’installation des antennes-relais, sans pour autant affaiblir la dynamique de développement de la téléphonie mobile. Quatre points sont ainsi visés par ce texte.
1) Réduire l’exposition des populations par la mise en place d’un principe de sobriété d’émission
Il s’agit en premier lieu de revoir à la baisse les seuils maximum autorisés d’émissions électromagnétiques, à l’aune des pratiques en vigueur dans les autres pays européens. La France autorise actuellement des valeurs d’exposition du public oscillant entre 41 et 61 volts/mètre selon la fréquence utilisée, alors que nombre de nos voisins ont adopté des normes comprises entre 3 et 6 volts/mètre, sans que cela ne nuise pour autant aux capacités de couverture des différents opérateurs. Par mesure de prévention, il serait donc nécessaire d’introduire le principe de sobriété d’émission, dit principe « ALARA » (As low as reasonnably achievable), dans la loi, afin de tendre vers les plus faibles volumes d’émission possibles, sans que cela n’altère la qualité de la couverture. Il s’agit notamment de faciliter l’intervention publique sur les territoires où l’on enregistre des « points chauds », c’est-à-dire des dépassements atypiques des valeurs moyennes.
En complément de cette intention générale, des mesures spécifiques de protection seront prises en faveur des enfants de moins de 6 ans, plus vulnérables que le reste de la population, et pour lesquels aucune étude ne peut documenter l’absence vérifiée d’impact sanitaire suite à une exposition prolongée aux rayonnements électromagnétiques.
2) Renforcer l’information des populations
La question de l’information de la population sur les localisations d’implantations d’infrastructures, ainsi que les volumes d’émissions auxquels elle est exposée selon les lieux d’habitation, nécessite également de meilleurs développements. Jusqu’à présent, aucune publicité n’est donnée aux choix d’installation des antennes-relais, et de nombreux citoyens ignorent vivre à proximité de l’une d’entre elles. La réalisation de mesures à l’extérieur et à l’intérieur des habitations dans les zones exposées n’est également pas prévue dans les textes en vigueur, ce qu’il convient de corriger.
Ce texte estime également que le débat sur le développement des antennes-relais et le développement des nouvelles technologies des télécommunications électroniques mérite d’être porté non seulement par les décideurs et les opérateurs, mais également par tous les citoyens. Il s’agit de promouvoir une forme de gouvernance participative, par la création de commissions d’information et de suivi ouvertes aux associations.
3) Associer les pouvoirs locaux à la régulation
En outre, cette proposition de loi s’attache à inscrire la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale, détenteurs de la compétence en termes d’établissement et d’exploitation des infrastructures et réseaux de communication électronique, dans le processus de décision. En effet, le rôle des pouvoirs publics locaux est actuellement minoré. Le Conseil d’État a en effet jugé, en octobre 2011, que seules les autorités de l’État sont compétentes pour réglementer l’implantation des antennes-relais de téléphonie mobile. Il s’agit par conséquent de donner aux maires ou aux présidents d’intercommunalité la possibilité de surseoir à l’implantation d’un équipement, en motivant leur position de manière suffisamment étayée.
4) Mutualiser les équipements pour protéger les populations des habitats collectifs
L’implantation des équipements électromagnétiques fait apparaître fortes différences sociales et territoriales, selon le type d’habitat. Il est en effet possible de constater une forte concentration de pylônes sur les toits des locaux d’habitation collective, et notamment sur ceux des Habitations à Loyer Modéré, pour les raisons mentionnées précédemment. De ce fait, les populations les plus démunies sont les plus exposées aux rayonnements électromagnétiques. Il est par conséquent nécessaire d’avancer dans deux directions. D’une part, par souci d’équité, le loyer perçu par le bailleur pourrait être partiellement redistribué aux locataires du local concerné via des exonérations sur les charges locatives. D’autre part, il est nécessaire d’encourager la mutualisation des infrastructures entre les opérateurs de téléphonie mobile.
Il devient désormais indispensable, pour le législateur, de pallier les carences du droit relatives à l’encadrement de l’implantation des antennes-relais. Les collectifs citoyens qui se sont multipliés ces dernières années témoignent de l’inquiétude des populations quant aux conséquences des pollutions électromagnétiques sur leur bien-être. Cet enjeu de santé publique doit recevoir une réponse rapide de la part des institutions de la République.
Tel est l’objet de la proposition de loi que nous vous proposons d’adopter.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Au début de l’article L. 34-9 du code des postes et des communications électroniques est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Les installations de l’État établies pour les besoins de la défense nationale ou de la sécurité publique ou utilisant des bandes de fréquences ou des fréquences attribuées par le Premier ministre à une administration pour les besoins propres de celle-ci, en application de l’article L. 41, ne sont pas concernées par la présente section. »
Article 2
Les trois derniers alinéas de l’article L. 34-9-1 du même code sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Dans la limite du plafond ainsi établi, les opérateurs s’emploient à ce que ces valeurs tendent vers les plus faibles niveaux possibles, sous réserve d’assurer la continuité du service rendu et le maintien de la couverture réseau.
« La municipalité ou l’établissement public intercommunal compétent en matière d’exploitation des infrastructures de télécommunications peut lancer, sur son territoire, des campagnes annuelles de mesures, par des organismes répondant à des exigences de qualité fixées par décret.
« Le résultat de ces mesures est transmis, par les organismes mentionnés au deuxième alinéa, à la collectivité ou à l’établissement public responsable, à l’Agence nationale des fréquences qui en assure la mise à disposition du public en complétant ses données cartographiques, ainsi qu’à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
« Lorsque la mesure est réalisée dans les locaux d’habitation, les résultats sont transmis à leurs propriétaires et à leurs occupants. Ces résultats doivent mentionner le nom du bureau de contrôle. Tout occupant d’un logement peut avoir accès, auprès de l’Agence nationale des fréquences, à l’ensemble des mesures réalisées dans le logement.
« Lorsque la mesure fait apparaître un dépassement significatif de la moyenne observée au niveau national, l’Agence nationale des fréquences enjoint au(x) propriétaire(s) du ou des équipements mis en cause de procéder, à leurs frais, à la réduction du volume d’émission. De nouvelles mesures sont effectuées à l’issue de l’opération. En cas de persistance d’un niveau anormalement élevé, le maire ou le président de l’établissement public intercommunal compétent peuvent faire procéder à la désactivation de l’équipement, aux frais de son propriétaire. »
Article 3
Après l’article L. 34-9-2 du même code sont insérés des articles L. 34-9-3 à L. 34-9-7 ainsi rédigés :
« Art. L. 34-9-3. – Lorsqu’il est constaté, dans le périmètre d’un même local d’habitation, la présence de plusieurs équipements radioélectriques, l’Agence nationale des fréquences adresse aux opérateurs gestionnaires desdits équipements une demande de mise en place d’un plan de mutualisation des infrastructures existantes. Elle en surveille, en lien avec le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale, la bonne exécution. Si elle constate, dans un délai estimé raisonnable, la non-effectivité de cette opération, elle fait procéder à la désactivation d’un ou plusieurs des équipements présents dans le périmètre concerné, aux frais de leurs propriétaires.
« Art. L. 34-9-4. – Tout projet d’implantation d’une antenne-relais de téléphonie mobile doit faire l’objet d’un affichage clair et visible en mairie, ainsi que dans le périmètre du local d’habitation concerné.
« Art. L. 34-9-5. – Aucune antenne-relais de téléphonie mobile n’est installée au sein du périmètre d’un établissement scolaire ou d’un établissement d’accueil d’enfants de moins de six ans. La délimitation précise du périmètre au sein duquel s’exerce cette interdiction est définie par décret.
« Dans ces établissements, l’accès sans fil à internet est désactivé au profit des connexions filaires.
« Art. L. 34-9-6. – Lorsque l’installation d’une antenne-relais de téléphonie mobile dans le périmètre d’un immeuble d’habitation fait l’objet de l’acquittement d’un loyer, celui-ci est réparti à parts égales entre propriétaires et occupants dudit immeuble.
« Art. L. 34-9-7. – Sur le territoire de la commune ou de l’établissement public intercommunal compétent, une commission d’information et de suivi sur les antennes-relais examine annuellement les résultats des mesures réalisées en application de l’article L. 34-9-1. Ses séances sont publiques. Cette commission doit être consultée sur les projets de déploiement présentés par les opérateurs.
« La commission d’information et de suivi sur les antennes-relais se compose d’élus, de représentants des exploitants des réseaux, de membres des services de l’État concernés et de représentants d’associations agréées œuvrant dans le champ de la protection de l’environnement et de la santé. Ses membres exercent leurs fonctions à titre gratuit. »
Article 4
Le premier alinéa de l’article L. 33-3 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve de leur conformité aux dispositions du présent code, les installations radioélectriques n’utilisant pas des fréquences spécifiquement assignées à leur utilisateur sont établie après consultation de la commission d’information et de suivi sur les antennes-relais mentionnée à l’article L. 34-9-4 du présent code, sur présentation de la décision d’accord de l’Agence nationale des fréquences mentionnée au quatrième alinéa de l’article L. 43.
« La commission transmet un avis au maire ou au président de l’établissement public de coopération intercommunale, qui peut décider de sursoir au projet d’installation. Cette décision est motivée par le degré de concentration d’installations existantes dans le périmètre concerné, l’impact de l’équipement sur l’environnement naturel, et toute information susceptible d’étayer significativement la possibilité d’un risque sanitaire sur les populations environnantes. »
Article 5
Le cinquième alinéa du I de l’article L. 43 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque l’Agence nationale des fréquences estime que, dans le périmètre d’un local d’habitation, un projet d’implantation d’une antenne-relais pourrait être évité par une meilleure mutualisation des équipements entre plusieurs opérateurs, elle ne peut donner d’accord. »
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Source : http://www.assemblee-nationale.fr/14/propositions/pion1002.asp
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Voir également :
- "Proposition de loi relative à la régulation de l’installation des antennes relais de téléphonie mobile" - Jean-David Ciot (PS) - Oct 2012