Appuyée par les médecins de l'Asef (Association Santé Environnement France), la députée Laurence Abeille a déposé en décembre 2012 une proposition de loi demandant l'application du principe de précaution face aux risques des ondes électromagnétiques émises par les antennes relais. Mais l'Académie Nationale de Médecine estime que cette demande est " abusive ", " trompeuse " et " fondée sur un flou scientifique et réglementaire ".
Ainsi, selon elle, le classement en " possiblement cancérigène " (2B) par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) ne concerne pas les antennes relais mais les téléphones portables, dont les niveaux d'émission entraîneraient une exposition aux champs électromagnétiques 100 à 100.000 fois plus forte que les antennes. Et elle ajoute qu' " on ne connaît aucun mécanisme par lequel les champs électromagnétiques dans cette gamme d'énergie et de fréquence pourraient avoir un effet négatif sur la santé ". Elle se fonde pour avancer ces affirmations sur le rapport scientifique de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire Environnementale et au Travail (Afsset) relatif aux radiofréquences, daté d'octobre 2009. Ce rapport avait en effet conclu que les champs électromagnétiques utilisés en téléphonie mobile ne génèrent pas de radicaux libres de l'oxygène, ne potentialisent pas le stress oxydant ; ne sont ni génotoxiques, ni co-génotoxiques, ni mutagènes , ni cancérogènes ou co-cancérogènes ; n'auraient pas d'effet inducteur non thermique sur l'apoptose cellulaire, en particulier pour les cellules d'origine cérébrale; ni d'effet délétère sur les cellules du système immunitaire ; ni d'effet sur la sécrétion de mélatonine.
Par ailleurs, concernant l'électrohypersensibilité, pour l'Académie de Médecine " à ce jour, aucun système sensoriel humain permettant de percevoir les champs électromagnétiques utilisés par la téléphonie mobile n'a été identifié. Des dizaines d'études ont été effectuées ; elles ont montré à la quasi-unanimité que les sujets se disant électrohypersensibles, bien que manifestant des troubles variés en présence de dispositifs émetteurs de champs électromagnétiques, sont incapables de reconnaître si ces dispositifs sont actifs ou non ".
Enfin, concernant la demande de la députée d'abaisser les valeurs limites des émissions à 0,6V/m, elle n'a aucune justification scientifique, estime l'Académie qui considère, au contraire, que cette baisse, en réduisant les zones de couverture, entrainerait une multiplication des antennes, et par conséquent une plus forte exposition aux ondes, celle-ci augmentant lors du passage d'une zone de couverture à une autre.
Qu'en est-il exactement ? Les ondes électromagnétiques des antennes relais sont- elles vraiment sans risques pour la santé ? On aimerait le croire. Mais les choses ne sont pas si simples. Et l'ASEF, regroupant plus de 2500 médecins, ne partage pas l'avis de l'Académie qui, selon elle, " s'embourbe dans le déni ".
" Nous sommes d'accord sur un point avec l'Académie, la nocivité des antennes relais n'a pas encore été confirmée. Mais peut-on se permettre d'imposer (ces antennes) à une population en lui expliquant que nous en saurons plus dans 20 ans lorsque la science aura tranché?" s'interroge le Dr Patrice Halimi, Secrétaire Général de l'ASEF. Pour lui les risques potentiels concernant le cancer sont, contrairement à ce que dit l'Académie, bien réels. Ainsi un rapport du CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) a classé le 31 mai 2011 les champs électromagnétiques de radiofréquences comme " peut être cancérigènes " (http://www.iarc.fr/fr/media-centre/pr/2011/pdfs/pr208_F.pdf). En outre, le nouveau rapport Bionitiative, basé sur 1 800 nouvelles études scientifiques, montre que les ondes électromagnétiques pourraient altérer la santé des utilisateurs de téléphones portables.
L'Académie de Médecine s'est trompée en 1996 concernant la toxicité de l'amiante qui a finalement été interdite en 1997.
Les effets des ondes électromagnétiques, comme les effets du bisphénol A, et de beaucoup de substances chimiques, notamment les pesticides, risquent aussi de n'apparaitre que longtemps après l'exposition à ces produits.
Demander l'application du principe de précaution concernant l'implantation des antennes relais, la baisse de leur niveau d'émission dont les normes ont obsolètes, et une loi qui vise à protéger les populations, n'est que du bon sens, même si les études scientifiques n'ont pas (encore) démontré formellement la toxicité des ondes électromagnétiques.
Hervé de Malières
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Source : http://www.bioaddict.fr/article/antennes-relais-des-medecins-en-desaccord-avec-l-academie-de-medecine-a3727p1.html