Santé et portables : Bouygues Telecom contre-attaque - Le Figaro du 14/02/2004



Le ton monte entre les opérateurs de téléphonie mobile et les associations de défense des riverains d'antennes-relais. Le bras de fer se déplace désormais sur le terrain judiciaire. Bouygues Telecom a décidé d'intenter, devant le tribunal de grande instance de Paris, deux actions civiles distinctes. Joint hier par téléphone, l'opérateur a confirmé cette information, mais a refusé de la commenter.

La première action, une assignation en diffamation, vise Étienne Cendrier, le coordinateur national de l'association Priartem (Pour une réglementation des implantations d'antennes-relais de téléphonie mobile). Bouygues estime «parfaitement diffamatoires» différents propos tenus dans un article intitulé «Antennes-relais : le face-à-face» publié dans Le Journal du dimanche du 9 novembre. Voici les phrases incriminées : «La téléphonie mobile doit être compatible avec la santé publique. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Les opérateurs dissimulent les vraies expositions de la population pour une histoire de gros sous.» Puis : «Nous pensons en effet que les opérateurs sont prévenus en amont, ce qui leur permet de tricher en baissant les puissances.» Et enfin : «Savez-vous qu'il y a actuellement à Paris un chercheur qui trouve des résultats élevés quand il fait des mesures tout seul et des expositions minimales quand il travaille en prévenant les opérateurs ?» Estimant que ces propos portent atteinte à son honneur et à sa considération, Bouygues Telecom réclame à leur auteur 200 000 euros en réparation du préjudice subi.

«On essaie de me faire taire mais je n'ai pas l'intention de me laisser impressionner, prévient Étienne Cendrier. Ils n'ont plus aucun argument scientifique alors ils tentent de m'écrabouiller. Je suis non imposable, je vais être obligé d'avoir recours à l'aide juridictionnelle.» Me Richard Forget, l'avocat d'Étienne Cendrier, s'étonne «que l'opérateur n'ait pas choisi d'exercer un droit de réponse et qu'il exige 200 000 euros et non un euro symbolique comme cela se fait habituellement dans ce genre d'affaires».

La deuxième action intentée par Bouygues Telecom concerne deux associations de défense des riverains d'antennes-relais, Priartem et Agir pour l'environnement, ainsi que Marc Cendrier, le père d'Étienne Cendrier, qui milite lui aussi pour une réglementation plus stricte. Il leur est reproché d'avoir bloqué l'installation d'une antenne dans le Xe arrondissement de Paris les 6 et 7 janvier. «Nous sommes victimes d'une attaque brutale de la part de Bouygues qui a choisi le terrain de la procédure judiciaire, commente Janine Le Calvez, présidente de Priartem. Nous nous défendrons et garderons le cap pour obtenir une réglementation garantissant la santé des riverains. Nous avons alerté les élus et la mairie de Paris.» Celle-ci semble prête à enclencher une négociation avec les opérateurs et les associations pour éviter une guerre de tranchée.

Muriel Frat, Le Figaro du 14/02/2004

Robin Des Toits
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