Lors de la conférence environnementale à Paris, le 14 septembre, après le discours inaugural de François Hollande. | Reuters/JACKY NAEGELEN
Fin du discours... Dans les travées de l'hémicycle, François Hollande serre des mains, tout sourire. Delphine Batho, la ministre de l'écologie, applaudit plus chaleureusement que le reste de l'assemblée : la journée qu'elle avait la charge d'organiser, démarre sous de bons auspices. Rassurée, elle glissera plus tard : "S'il y avait encore des doutes sur le poids de l'environnement dans ce gouvernement, la page est tournée." L'eurodéputé José Bové félicite le premier ministre.
En ce vendredi 14 septembre, au premier jour de la conférence environnementale, au Palais d'Iéna qui abrite habituellement les travaux du Conseil économique, social et environnemental à Paris, le vert domine et le buffet est bio. L'euphorie gagne les ONG de défense de l'environnement. Certains de leurs représentants se félicitent d'avoir retrouvé dans le discours présidentiel plusieurs de leurs propositions pour lesquels ils ont mené un intense lobbying ces derniers jours.
Un portrait encadré de Paul Watson dépasse du sac à dos de Nadir Saïfi, membre d'Ecologie sans frontière. Tout content, il raconte avoir pu, comme prévu, le brandir dans l'hémicycle, avant de le ranger sagement à l'arrivée du président de la République. Faute de quoi, il avait quelque chance d'être raccompagné vers la sortie.
DÉBATS DE BONNE TENUE
Moins de mines réjouies du côté du Medef. Facile de repérer Jean-Pierre Clamadieu, président de la commission du développement durable du syndicat patronal, glissant qu'il n'avait "pas été enthousiasmé".
Du vert aussi autour du cou des équipes d'accueil rapidement chargées de parquer les journalistes au rez-de-chaussée, tandis que les tables rondes démarrent dans les étages supérieurs. A cinquante par salle, avec un temps de parole forcément limité, l'ambiance retombe un peu. Les participants ont majoritairement jugé les débats de bonne tenue, tout en reconnaissant qu'il serait difficile de faire significativement avancer des sujets aussi complexes que ceux abordés par cette conférence. Accusés de monopoliser la parole, les syndicats, inquiets de la fermeture programmée en 2016 de la centrale nucléaire de Fessenheim, ne sont pas dans la tonalité de la journée. Avec les ONG, c'est le choc des cultures, surtout lorsqu'un représentant syndical assène que "de toute façon, les énergies renouvelables ne sont pas matures".
Pendant les pauses, Delphine Batho et Arnaud Montebourg son collègue du redressement productif, occupent une bonne partie des conversations : ce "tandem formidable", même s'il ne pédale pas toujours dans la même direction, copréside la table ronde sur la future transition énergétique. "Cet après-midi, Montebourg a plutôt donné l'impression de s'ennuyer et de regretter de ne pas être ailleurs", raconte en fin de journée le directeur général de Greenpeace France, Jean-François Julliard. Une attitude ombrageuse qu'une députée attribuait aux arbitrages rendus par François Hollande, plutôt favorables à Delphine Batho.
DELPHINE BATHO RECADRE
A la sortie de la première partie de la table ronde, M. Montebourg jette le trouble en déclarant qu'il fallait observer ce qui se faisait à l'étranger en matière de technologies d'exploitation des gaz de schiste, tentant de rouvrir une porte que la majorité des participants avaient cru entendre bien fermée le matin même par le président de la République.
Delphine Batho, chargée de coordonner le travail des quatorze ministres répartis dans les cinq tables rondes, a dû recadrer et réaffirmer qu'aucun permis de recherche concernant les gaz de schiste ne serait accordé pendant son quinquennat.
Chacun tient son rôle : Chantal Jouanno, l'ancienne secrétaire d'Etat à l'écologie désormais sénatrice (UMP) de Paris et qui participe aux travaux sur les risques sanitaires environnementaux, proteste : "Ca part dans tous les sens. Tout ça me fait dire que les arbitrages sont déjà rendus et que ces tables rondes sont factices."
"Nous allons travailler sur un objectif de zéro artificialisation nette des territoires en 2025, assure pour sa part Cécile Duflot, la ministre du logement. L'idée est de travailler sur une ville durable, dense, compacte et de réutiliser les friches, commerciales, industrielles et artisanales."
ÉDUCATION À L'ENVIRONNEMENT
Il y a même quelques surprises : "Sur la question de l'urbanisme et de l'artificialisation des terres, on a eu un bon dialogue avec les responsables agricoles de la FNSEA, ce n'était pas gagné,", témoigne Christophe Aubel, directeur de l'association Humanité et biodiversité.
Les participants se sont également accordés sur la nécessité de renforcer l'éducation à l'environnement, dont le niveau a été jugé "pathétique" par Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue de protection des oiseaux. Le biologiste Pierre-Henri Gouyon a été heureusement surpris que "la relation qui lie facteurs environnementaux et cancer n'a été nié par personn e"
De l'autre côté de la place d'Iéna, quelques petites dizaines de militants opposés au nucléaire, à l'exploitation du gaz de schiste ou à la construction de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, en Loire-Atlantique, avaient déployé leurs banderoles.Samedi 15 dans l'après-midi, le premier ministre Jean-Marc Ayrault devait conclure la conférence, appelée à devenir un rendez-vous annuel. Vendredi, Etienne Cendrier, porte-parole de Robin des toits lançait : "Aujourd'hui on a eu les fiançailles c'est toujours chouette. Demain on va voir le contenu du contrat de mariage..."