"La vérité sur... la chasse aux places sur les toits" - Challenges - 14/04/2012

Avec la menace de saturation des réseaux de téléphonie mobile et l'arrivée de Free, les opérateurs se battent pour installer de nouvelles antennes.



Certains trouvent un coffre rempli de pièces d'or au fond de leur jardin, d'autres cochent les bons numéros sur la grille du Loto, mais, pour d'autres encore, le jackpot vient du ciel. Ou plutôt du toit. Pour peu qu'il forme un « point haut », autrement dit qu'il soit intéressant pour la pose d'une antenne, il peut rapporter gros, jusqu'à 14 000 euros par an s'il est situé à Paris dans un quartier très dense. Car les « points hauts » - 50 000 en France - sont devenus une denrée rare que s'arrachent les opérateurs de téléphonie mobile qui ont besoin d'installer des antennes-relais pour faire face à l'augmentation du trafic. Les opérateurs identifient souvent les mêmes points hauts, si bien qu'un toit peut être valorisé à plus de 50 000 euros par an si les quatre opérateurs veulent y placer chacun une antenne!

Nouveaux prix

En ville, le recours aux toits est indispensable. « Plus qu'un toit, ce qui intéresse l'opérateur, c'est un point haut, sans un mur en face de l'antenne qui bloquerait les ondes », corrige Jean-Marie Danjou, directeur général délégué au collège « mobile » de la Fédération française des télécoms (FFT), qui regroupe les principaux opérateurs, à l'exception de Free. Mais il ne s'agit pas d'être trop haut. Parmi les antennes qui s'accrochent à la tour Eiffel, aucune, par exemple, ne sert à la téléphonie mobile. « Ce sont des antennes de télévision et de radio, confirme Jean-Marie Danjou. La tour Eiffel n'est pas adaptée aux mobiles. Le toit d'un immeuble est plus indiqué. » Résultat: c'est la course entre les opérateurs pour récupérer des bouts de toits, d'autant que les promoteurs du photovoltaïque commencent eux aussi à s'intéresser à ces surfaces, en surfant sur la vague écologique. « Le montant des locations de toit a augmenté et la tendance est à la multiplication du nombre d'antennes », constate Laure Bourgoin, chargée de mission sur l'habitat à l'association de consommateurs et d'usagers CLCV. C'est ainsi que la société de HLM ICF La Sablière a des contrats de location pour ses toits franciliens qui lui ont rapporté 2,4 millions d'euros en 2010!

Nouvel opérateur

La demande est d'autant plus pressante qu'un quatrième opérateur, Free, est entré dans la course et doit déployer son propre réseau d'ici à 2018. « Nous avons un plan pour couvrir 99 % de la population, reconnaît Maxime Lombardini, directeur général d'Iliad-Free. Cela représente de 9 000 à 10 000 points hauts en cinq ou six ans. Les identifier n'est pas le plus difficile: le marché des points hauts est bien organisé. » TDF en est l'acteur le plus important. Il possède plusieurs milliers de pylônes qu'il loue aux opérateurs qui en font la demande. Les opérateurs de téléphonie possèdent également leur propre parc de pylônes. « Ils ont pris l'engagement d'en louer l'accès à un quatrième opérateur », poursuit Maxime Lombardini. Et puis, Orange a promis un coup de main spécifique qui assurera à Free une couverture rapide dans toute la France. « Cet accord sera effectif lorsque Free Mobile disposera d'une couverture d'au moins 25 % de la population », précise cependant un communiqué commun des deux groupes. Résultat: Free cherche des toits de toute urgence.

Nouveaux besoins

Outre l'arrivée d'un nouvel acteur, l'autre facteur d'animation du marché vient des « zones noires » qui sont desservies par les trois opérateurs français initiaux, et où la saturation guette. « Il faut renforcer le réseau », admet pudiquement Orange. Même l'Arcep, l'autorité de régulation du secteur, reconnaît, du bout des lèvres, la possibilité d'un embouteillage général. L'arrivée de l'Internet mobile et de la vidéo sur les portables entraîne, en effet, un afflux de données qui pourrait provoquer l'asphyxie. « Nous proposons de nouveaux services, cela implique l'installation de nouvelles antennes », confirme Orange. Mais le risque de saturation n'est pas seul en cause, assure Etienne Cendrier, porte-parole de l'association Robin des toits, qui milite contre la prolifération d'antennes: « Avec la 4G, qui va remplacer la 3G, les fréquences sont plus courtes. Il faudra installer plus d'antennes. »

Les associations commencent en effet à s'inquiéter du pullulement des antennes. Orange écarte le risque sanitaire d'un revers de la main en faisant observer que « l'OMS a déclaré qu'il n'y avait aucun danger avéré pour la santé ». Une argumentation qui n'a pas suffi à rassurer la cour d'appel de Versailles: son arrêt a obligé Bouygues Telecom à démonter en 2009 une antenne installée à Tassin-la-Demi-Lune (Rhône), au motif qu'elle était trop proche des habitations. La FFT, furieuse, a fait observer que le jugement « ne correspond à la position d'aucune autorité sanitaire nationale, ni à celle de l'OMS » et porte atteinte, selon elle, au développement de la téléphonie mobile en France. Ce jugement a beau être exceptionnel, il révèle l'inquiétude croissante des habitants. A tel point que poser une antenne sur un point haut est devenu un parcours du combattant. Les autorisations sont plus difficiles à obtenir, avec des délais frisant parfois le ridicule: à Paris, il faut compter vingt-quatre mois. « Free aura des difficultés, prédit un opérateur sous couvert d'anonymat. Les Verts bloquent les installations de nouvelles antennes. »

Tous les opérateurs ne sont pas également inquiets. « Nous n'avons pas de problème de toit, promet SFR. Notre réseau est déjà déployé. Nous n'avons pas vraiment besoin d'installer de nouvelles antennes. » Et les investissements de 1,5 milliard par an que SFR réalise dans son réseau ne concernent pas les « points hauts ». Les autres opérateurs sont moins timides et reconnaissent volontiers la nécessité de densifier leur réseau.

Nouvelle technologie

Pour Free, la solution pourrait bien venir aussi d'une innovation technologique. Free a en effet intégré une puce baptisée Femtocell dans sa Freebox Revolution, autrement dit une mini-antenne relais 3G qui permet de connecter un téléphone portable au réseau. Ces mini-antennes ne couvrent pas une grande surface, mais elles permettent de passer des appels depuis son domicile. Or cela représente près d'un tiers des appels. Free a donc trouvé un moyen économique d'installer massivement des antennes. Elles ne sont pas sur des « points hauts », mais contribuent à fluidifier le trafic. Dernier avantage pour l'opérateur: il n'a pas à régler un loyer pour le toit, c'est le consommateur qui paie pour la box.

Paul Loubière

Installer une antenne dans la capitale est devenu un casse-tête pour les opérateurs: d'un côté, les places sont rares donc chères; de l'autre, il faut compter vingt-quatre mois pour obtenir toutes les autorisations administratives.

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Source : http://www.challenges.fr/magazine/20110414.CHA0418/la-verite-sur-la-chasse-aux-places-sur-les-toits.html

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NB Robin des Toits :
"l'association Robin des toits, qui milite contre la prolifération d'antennes" -> FAUX

Voir : http://www.robindestoits.org/_a1520.html

Extrait : "L'association nationale Robin des Toits a pour mission de rechercher des technologies et des pratiques de communication sans fil respectueuses de la santé publique. Ce qui suppose une réglementation réelle centrée sur un maximum d'intensité en tous lieux de 0,6V/m pour les émissions de la téléphonie mobile GSM.
Le programme de Robin des Toits comporte un moratoire sur la 3G (UMTS) et 4G jusqu'à diffusion d'un rapport scientifique crédible et l'interdiction légale pour les émissions Wi-fi, FemToCell, Wimax, DECT et Bluetooth, pour lesquels la protection du public est impossible en raison de leurs caractéristiques techniques (fréquence, densité des données transmises...)
Voir : http://www.robindestoits.org/attachment/115208/
Robin des Toits réclame plus d’antennes GSM (2G), différentes des antennes actuelles, moins puissantes et concentrées sur la couverture des espaces extérieurs. (...)"

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Voir également :

- Communiqué de presse du CIRC sur les risques cancérogènes du téléphone portable pour l'homme - 31/05/2011

- Réponse à la réaction des opérateurs au documentaire de Sophie LEGALL sur la téléphonie mobile (France 3) - 08/06/2011

- Téléphone portable et cancer du cerveau - Le Journal de l'Institut Curie - Février 2012

Robin Des Toits
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