Faut-il protéger les enfants des écrans ? C’est ce que pensent les parents et les écoles de la ville irlandaise de Greystones, au sud de Dublin. Collectivement, ils ont décidé, dès le mois de mai, de mettre en place un pacte qui interdit les smartphones aux enfants à la maison et dans les huit écoles primaires de la ville irlandaise, et ceci jusqu’au collège, d’après The Guardian.
Avec cette décision, les parents entendent réduire la pression et l’influence exercées par les réseaux sociaux sur les enfants. « L’enfance est de plus en plus courte », a déclaré Rachel Harper, directrice de l’école St Patrick, qui est à l’origine de l’initiative, selon The Guardian. Les parents craignent que les écrans exposent les enfants à plus d’anxiété et à du contenu pour adultes. « Plus longtemps nous pourrons préserver leur innocence, mieux ce sera », a déclaré au journal britannique Laura Bourne, qui a un enfant en petite section dans une école de Greystones.
Une future politique nationale
D’après Rachel Harper, le pacte a été conclu parce que le niveau d’anxiété des enfants augmente et qu’il ne peut être qu’en partie attribué à la pandémie de Covid-19. Les écoles de la ville ont fait circuler des questionnaires aux parents afin de les inviter à des réunions et réfléchir à une initiative pour remédier à cette anxiété. En est ressortie la nécessité de créer un « village » sans smartphone, a expliqué Rachel Harper.
Les téléphones portables étaient déjà interdits auparavant dans l’enceinte des écoles, mais les établissements scolaires constataient quand même l’effet des réseaux sociaux sur les enfants qui possédaient un smartphone et la curiosité que cela soulevait chez les autres enfants. Des élèves de neuf ans ont commencé à demander des smartphones, a expliqué la directrice de l’école St Patrick selon The Guardian.
Mettre en place une politique à l’échelle de la ville réduit la possibilité qu’un enfant ait un camarade de classe qui soit équipé d’un smartphone. Les parents, eux, vendent ce pacte à leurs enfants comme étant une nouvelle règle de l’école, a expliqué Rachel Harper à The Guardian.
Cette initiative a suscité l’intérêt des associations de parents irlandaises mais aussi à l’étranger. Le ministre de la Santé du pays, Stephen Donnelly, qui vit près de Greystones a recommandé de transformer ce pacte en politique nationale. « L’Irlande peut être, et doit être, un leader mondial pour s’assurer que les enfants et les jeunes ne sont pas ciblés et ne souffrent pas de leurs interactions avec le monde numérique », a-t-il écrit cette semaine dans The Irish Times. « Nous devons permettre aux parents de limiter plus facilement le contenu auquel leurs enfants sont exposés », a-t-il également écrit.
Pour les parents, les conséquences de ce pacte ont été immédiates. Nikkie Barrie, qui a un enfant de onze ans a déclaré à The Guardian : « Ce code fait une telle différence dans ma vie. Si je sais que 90 % de la classe est d’accord, cela me facilite la tâche pour dire non », a-t-elle expliqué. Un avis partagé par Laura Bourne, « si tout le monde le fait, on n’a pas l’impression d’être à part. C’est tellement plus facile de dire non », a indiqué au journal britannique la mère d’un enfant en petite section. Compte tenu de l’effet du smartphone sur son fils de treize ans, Nikkie Barrie souhaiterait même que le pacte soit étendu jusqu’aux premières années du collège.
Du côté des enfants interrogés par The Guardian, le pacte est plutôt bien accueilli. Jane Capatina a dix ans, elle est à l’école de St Patrick et a accepté de ne pas avoir de smartphone pendant au moins deux ans. « J’aimerais en avoir un, j’aimerais écrire à mes amis, mais je ne veux pas devenir dépendante », a-t-elle raconté. Pour Josh Webb, qui a douze ans, « ce n’est pas la fin du monde », mais lui, qui se souvient s’être senti exclu quand ses camarades regardaient des vidéos sur leur smartphone alors qu’il n’en avait pas, a déclaré qu’il « serait utile d’étendre les restrictions d’utilisation du téléphone à tous les âges ».
La mise en application du pacte n’est évidemment pas obligatoire. L’interdiction est basée sur le volontariat. Les associations de parents des huit écoles primaires de la ville ont le choix d’y participer ou non. Mais selon Rachel Harper, les parents sont suffisamment nombreux à avoir signé le pacte pour que cela devienne la nouvelle norme.
Article publié par Huffington Post le 12/06/2023, écrit par Camille PINEAU.
Autre article par le Figaro.