'Antenne-relais. Une riveraine craint pour sa vie' - Le Télégramme - 06/03/2009

Les riverains du terrain promis à l’élévation d’une antenne-relais de téléphonie mobile, à Loctudy, viennent de porter l’affaire devant le tribunal. L’une d’entre-eux a également saisi le préfet.



Nyves Allier, qui vit avec son mari depuis plus de vingt ans à proximité du terrain en question, a décidé de dévoiler publiquement le danger que pourrait faire peser sur sa santé la présence de cette antenne, puisqu’elle est porteuse d’un impla
Il y a un mois et demi, Nyves Allier avait déclaré qu’elle serait « prête à tout » pour empêcher la construction de l’antenne (Le Télégramme du 22 janvier). Une déclaration qui prend tout son sens à la lumière de son témoignage, aujourd’hui.

« Si ma valve se dérègle, c’est un risque mortel »
« À la suite d’un accident, survenu il y a longtemps, je suis porteuse d’un implant actif dans le cerveau, confie la jeune femme. Une valve neurologique programmable, qui régule le débit du liquide céphalorachidien ». Comme tous les porteurs de ce type d’implants, Nyves Allier est parfaitement informée du risque en cas d’exposition prolongée à des champs magnétiques (lire en encadré). « Si ma valve se dérègle, c’est un risque mortel », lâche-t-elle. Depuis six mois maintenant, elle se bat sur le terrain réglementaire avec les quelque trente autres familles riveraines, au sein du Collectif pour l’application du principe de précaution (CAPP), dont elle est la secrétaire (lire ci-dessous). Dans le même temps, mais jusque-là dans l’ombre, Nyves Allier avait mis son cas particulier entre les mains d’un avocat. Avec son aide et certificat médical à l’appui, elle a écrit au maire de Loctudy ainsi qu’à Orange, l’opérateur de l’antenne en question. Elle n’a pas eu de réponse. « Le maire est responsable de la santé publique dans sa commune », rappelle Nyves Allier, brandissant la lettre du préfet, auquel son avocat s’est également adressé.

Le préfet répondra « dans quelques jours »
Dans ce courrier, daté du 11 février, le préfet du Finistère, Jacques Witkowski, répond à l’avocat de Nyves Allier : « J’ai demandé aux services sanitaires d’examiner avec attention votre intervention et je ne manquerai pas de vous tenir informée dans les meilleurs délais des éléments qui m’auront été communiqués ». Pas de nouvelle depuis. Contactée hier, la préfecture nous en a données. « La Ddass doit faire connaître les résultats de son enquête au préfet incessamment. Dans les jours qui viennent, le préfet fera part de son appréciation sur cette enquête à Madame Allier ».


Les travailleurs porteurs d’implants actifs sont sous la garde d’une directive européenne
En février 2008, l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), dans une étude sur la présence des champs électromagnétiques en milieu professionnel, précise que, pour les porteurs d’implants actifs, « des dysfonctionnements électriques et/ou électroniques sont possibles (déprogrammation, reprogrammation, arrêt, stimulation ou inhibition inappropriés) ». Pour les travailleurs exposés aux champs électromagnétiques, une directive européenne, datant de 2004, exige des employeurs qu’ils veillent - entre-autres - aux porteurs d’implants actifs.

Marie-Line Quéau

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En attendant le Grenelle des antennes

Le CAPP avait interrogé le maire de Loctudy à plusieurs reprises. Ce dernier vient de leur répondre sur trois points. « Nous lui demandions copie du contrat d’assurance des opérateurs des antennes déjà implantées dans la commune, notamment près de l’école, pour connaître la couverture des risques sanitaires », détaille Loïc Larnicol, vice-président du CAPP. « Le maire nous répond qu’il a interrogé Orange. L’opérateur lui a répondu, sans davantage de précisions, " nous sommes couverts tous risques dommages et pertes d’exploitation" ». Totalement insuffisant pour le CAPP.

Une étude assortie d’analyses
« Nous souhaitions, poursuit Loïc Larnicol, que des mesures soient effectuées par le Criirem, un organisme scientifique indépendant ». Réponse du maire: « J’ai sollicité le maire de Brest qui dispose de personnel et de matériel adéquat pour faire ces mesures ». « C’est plutôt bien que la ville de Brest se préoccupe de ses antennes, commente Loïc Larnicol. Mais contrairement au Criirem, cette équipe n’a pas la possibilité de produire des analyses. Des chiffres ne suffisent pas, il faut le commentaire d’experts ». Le CAPP attendait enfin du maire qu’ils les mettent en contact avec son interlocuteur, chez Orange. « Une rencontre en mairie n’est pas exclue, a répondu le maire, mais Orange préfère attendre ce qui va ressortir du Grenelle des antennes, prévu le 26 mars ».

Espace protégé ou non ?
« On attend depuis octobre. Ça suffit ». Le CAPP a porté l’affaire devant le tribunal administratif fin février. Dans les dossiers que les riverains ont présentés individuellement pour contester cette implantation, il y a l’argument, documents officiels à l’appui, de la zone inondable dans laquelle est situé le terrain et le fait qu’il serait du ressort du Conservatoire du Littoral et non de la commune. La « dangerosité » du projet y est mise en avant. Surtout, la question de « l’intérêt public » de l’implantation se pose, de troublantes informations officielles venant le contester.

Les besoins de la zone déjà couverts !
Pour justifier « l’intérêt public », de cette antenne le maire de Loctudy assure que la zone à couvrir est aujourd’hui une « zone blanche ». « Or, sur le site internet d’Orange, une carte indique que le Finistère est couvert à 100% », s’étonne le CAPP, qui a interrogé des usagers. Des marins notamment, qui disent pouvoir se servir sans problème de leur portable. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, dit la même chose qu’Orange sur la base d’éléments fournis par… les opérateurs de téléphonie mobile eux-mêmes, au nombre desquels… Orange !

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Source en PJ.

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Voir agélement :

- Décret n°2006-1278 du 18 octobre 2006 relatif à la compatibilité électromagnétique des équipements électriques et électroniques - 18/10/2006

- « La téléphonie mobile n'est pas un service public » - Circulaire du 16/10/2001 relative à l'implantation des antennes relais de radiotéléphonie mobile

Robin Des Toits
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